vendredi 6 avril 2012

Prédication du Vendredi Saint - 6 Avril 2012 -

.Vendredi saint. Mc 15.33-39

Chants proposés :

Pour quel péché, Jésus ! pour quelle offense, LlS 80

Prosterné, je te révère (une str. après chaque lecture) LlS 81

Rédempteur adorable, Sur la croix attaché LlS 95

Célébrons par nos chants le Rédempteur du monde LlS 87

33 « A midi, il y eut des ténèbres sur tout le pays, jusqu’à trois heures de l’après-midi.

34 Et à trois heures de l’après-midi, Jésus s’écria d’une voix forte : "Eloï, Eloï, lama sabachthani ?" – ce qui signifie : "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?"

35 Quelques-uns de ceux qui étaient là, après l’avoir entendu, disaient : "Voici qu’il appelle Elie."

36 Et l’un d’eux courut remplir une éponge de vinaigre ; il la fixa à un roseau et lui donna à boire en disant : "Laissez donc, voyons si Elie viendra le descendre de là."

37 Cependant, Jésus poussa un grand cri et expira.

38 Le voile du temple se déchira en deux, depuis le haut jusqu’en bas

39 Quand l’officier romain qui se tenait en face de Jésus entendit son cri et le vit expirer de cette manière, il dit : "Cet homme était vraiment le Fils de Dieu !" »

Chère … voyons, … dois-je dire : assemblée en deuil ?

Voyez-vous, nous commémorons aujourd’hui un événement éminemment tragique, un fait historique qui ne nous grandit pas, c’est le moins qu’on puisse dire : nous avons poussé Jésus-Christ en croix !

Le Fils éternel de Dieu, celui « qui a toute l’approbation » du Père (Mt 3.17), n’a pas eu d’autre choix, dans son amour pour nous, que de se sacrifier pour nous. C’était la seule issue pour que nous échappions à la colère de Dieu.

C’est là une indication quant à la gravité de notre état pécheur, quant à l’énormité de notre culpabilité. Et cela nous rend profondément honteux et tristes. Nous ne sommes vraiment pas réunis aujourd’hui pour rigoler. Il plane sur le culte que nous célébrons en ce moment un pesant sentiment de culpabilité, de tristesse, de deuil.

Mais pas seulement, car d’un autre côté, comme nous le verrons encore, ce jour a été « accompli » (Jn 19.30) – et « accompli » de façon magistrale – ce dont nous avions le plus besoin, ce qui libère notre existence de sa chape de plomb, ce qui transforme notre vie et l’éclaire dès ici-bas et même pour l’éternité.

Ce qui s’est passé là-bas sur le mont du calvaire, sur le Mont Golgotha, cela nous soulage aussi au plus haut point. Si notre culte est empreint de honte et de tristesse, il est tout autant un culte de reconnaissance et de louange.

Voyons donc comment

LE SACRIFICE DE JESUS EN CROIX

a été

1. énorme,

2. volontaire,

3. bénéfique.

X X X 1 X X X

LE SACRIFICE DE JESUS EN CROIX

A été ENORME

Cela se remarque déjà à un fait troublant : « A midi, il y eut des ténèbres sur tout le pays, jusqu’à trois heures de l’après-midi. » (v. 33) Ce n’était pas une éclipse du soleil. Cela se passait lors de la fête juive de Pâque. A cette date, les positions respectives du soleil, de la terre et de la lune rendent une éclipse impossible.

Par ailleurs, une éclipse ne dure jamais trois heures comme cela a été le cas. Non, le soleil n’a pas été caché par la lune, mais, comme le précise Luc dans son Evangile, « le soleil s’obscurcit » (Lc 23.45), il cessa d’éclairer. Le Créateur était intervenu pour changer le fonctionnement normal de sa création, pour empêcher le soleil d’éclairer.

Cela s’était déjà passé une fois, avant l’Exode, quand Dieu a empêché le soleil d’éclairer les Egyptiens durant trois jours (Ex 10.21-23). Et cela se passera une nouvelle fois, tout juste avant le Jugement Dernier (Jo 2.10 ; 3.4). Dans les deux cas, Dieu exprime ainsi sa colère : dans l’Exode, contre Pharaon qui opprimait Israël ; avant le Jugement Dernier, contre ce monde incroyant qui se complait dans le péché.

Dans notre texte c’est encore la colère de Dieu qui se déverse, cette fois-ci sur « l’Agneau de Dieu qui porte le péché du monde » (Jn 1.29). « Le soleil » qui « s’obscurcit » donne une idée de la violence de la colère de Dieu contre notre péché.

Mais cela nous indique aussi combien Jésus doit nous aimer pour avoir été prêt à encaisser les coups de la colère divine aussi violente qu’implacable contre notre péché. C’est qu’il voulait ainsi nous éviter de connaître les ténèbres éternelles de l’enfer.

L’énormité du sacrifice de Jésus s’entend carrément à ce cri lancé du haut de la croix « à trois heures de l’après-midi » : « "Eloï, Eloï, lama sabachthani ?" – ce qui signifie : "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?" » (v. 34)

Au cours des trois heures d’obscurité, Jésus s’était débattu sous la colère de Dieu, avait encaissé la malédiction divine qui aurait dû nous frapper, essuyé d’effroyables tentations du diable qui ne voulait pas qu’il réussisse et « accomplisse » (Jn 19.30) notre salut, enduré les souffrances indescriptibles de l’enfer.

Il ne pouvait même pas s’accrocher à l’idée que le Père le soutenait. Non, Dieu l’avait « abandonné », il se tenait seul devant le tribunal de Dieu, avec l’énorme poids du péché et de la culpabilité du monde entier sur ses épaules.

C’est proprement incompréhensible. Pourtant, dans les prophéties messianiques, nous l’entendons souffrir de sa « détresse » (Ps 69.18), car le Père l’a « rejeté » et « se cache » (Ps 88.15). Le Fils appelle à l’aide, mais le Père est aux abonnés absents. C’est là que Jésus touche le fond de l’horreur. C’est là qu’il crie : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Etait-ce là le signe d’un manque de confiance en Dieu ? Non, car Dieu l’avait réellement « abandonné », ce qu’il ne fait jamais avec nous, les croyants. Sur nos lèvres, ce serait un péché, car « Dieu est fidèle et ne permettra pas que nous soyons tentés au-delà de nos forces, mais avec la tentation il préparera aussi le moyen d’en sortir, afin que vous puissiez la supporter. » (1 Co 10.13) Et ça, nous le devons à notre Seigneur qui s’est laissé « abandonner » à notre place pour que ça ne nous arrive jamais.

Ce qui laisse pantois, c’est que, même « abandonné » par le Père, Jésus ne le renie pas. Même là, nous l’entendrons dire : « Père, je remets mon esprit entre tes mains. » (Lc 23.46). D’ailleurs, dans notre texte, même au fond de l’abîme, il ne le renie pas et l’appelle « mon Dieu, mon Dieu ! »

Il a été « abandonné » par Dieu, il l’a aussi été par ses frères, les humains. A l’heure de la mort, au moment où la sympathie pour son sacrifice lui aurait été de quelque réconfort, on s’est encore moqué de lui.

Essayons de nous mettre à sa place : Jésus, du haut de la croix, voit la foule pour laquelle il endure la colère implacable de Dieu et les souffrances de l’enfer. Il voit ceux pour lesquels il trinque pour qu’ils échappent à cette terrible malédiction, et il les voit mépriser son sacrifice, comme il sait que, jusqu’à la fin du monde, il y aura d’innombrables personnes pour lesquelles il aura enduré tout cela pour rien. Ce n’était pas pour l’encourager à persévérer.

Et pourtant il l’a fait. Quel Sauveur admirable au fond de l’énormité de ses souffrances !

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LE SACRIFICE DE JESUS EN CROIX

A été volontaire

Il n’a pas apporté ce sacrifice contraint et forcé, ce qui lui aurait enlevé tout caractère de perfection et de sainteté. Tout dans l’Ancien comme dans le Nouveau Testament, tout indique que c’est son amour pour nous qui l’a poussé à prendre notre place dans le Jugement de Dieu.

Un jour, il avait déclaré : « Je donne ma vie pour la reprendre ensuite. Personne ne me l’enlève, mais je la donne de moi-même. » (Jn 10.17-18) Qu’il a « repris sa vie », cela nous le verrons dimanche, lors du culte de Pâques. Mais qu’il l’a « donnée de lui-même », cela ressort à la force du cri avec lequel il s’adresse à Dieu. « Il s’écria d’une voix forte » (v. 34).

Ce qui frappe, c’est de voir l’évangéliste souligner à deux reprises que Jésus reste aux commandes, bien que subissant le châtiment de la colère de Dieu contre le monde entier. Il a suffisamment de ressources pour « s’écrier d’une voix forte : "Eloï, Eloï, lama sabachthani ?" – ce qui signifie : "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?" » et c’est encore « en poussant un grand cri » qu’il « expira » (v. 37).

Il reste à la manœuvre jusqu’au bout. C’est sa décision de passer par là. Il avait annoncé : « Je veux faire ta volonté, mon Dieu » (Ps 40.9). Rien, même les souffrances infernales n’ont pu le détourner de cette décision. « Ayant aimé ceux qui lui appartenaient dans le monde, il les aima jusqu’à l’extrême. » (Jn 13.11)

C’est encore volontairement et consciemment qu’il « s’écria d’une voix forte : "Père, je remets mon esprit entre tes mains !" » puis « expira » (Lc 23.46).

« Béni sois-tu pour ta grâce éternelle,

Agneau divin, mon Rédempteur fidèle,

Toi qui conduis à la paix glorieuse

Mon âme heureuse. » (LlS 92:4)

Car le sacrifice de notre Seigneur en croix n’a pas seulement été énorme et volontaire,

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LE SACRIFICE DE JESUS EN CROIX

A été BENEFIQUE

Un détail de notre récit a plus d’importance qu’il n’y paraît : au moment où « Jésus poussa un grand cri et expira », « le voile du temple se déchira en deux, depuis le haut jusqu’en bas » (v. 37-38). De son côté, Matthieu souligne cette chose stupéfiante en commençant par : « Et voici que … » ! (Mt 27.51). Pourtant ce voile ou plutôt rideau était épais et se trouvait à un endroit où personne n’y touchait. Etrange aussi qu’il « se déchira […] du haut en bas » comme si une main invisible l’avait fait.

L’explication se trouve dans le fait que cela s’est produit au moment où « Jésus poussa un grand cri et expira ». Dieu avait fait mettre ce rideau pour que personne ne puisse entrer ni même voir dans « le saint des saint », ce « lieu très saint » (Ex 26.33) du Temple où se trouvait l’arche de l’alliance. Seul le souverain sacrificateur pouvait y entrer une fois par an pour asperger le couvercle de l’arche, le propitiatoire, et encore devait-il s’y rendre à reculons pour ne pas voir la gloire de Dieu.

Et voilà qu’avec la mort expiatoire de Jésus Dieu déchire ce rideau et permet de voir dans « le lieu très saint ». Ainsi Dieu donnait à comprendre qu’en payant pour nos péchés Jésus nous a réconciliés avec le Dieu trois fois saint, qu’on « vient au Père par Jésus » (Jn 14.6).

« Le sang » répandu pour nous sur la croix par « Jésus-Christ, son Fils, nous purifie de tout péché » (1 Jn 1.7) et nous ouvre le cœur de Dieu.

« Quand l’officier romain qui se tenait en face de Jésus entendit son cri et le vit expirer de cette manière, il dit : "Cet homme était vraiment le Fils de Dieu !" » (v. 39)

Cet homme avait été le témoin, et en partie l’acteur, de l’arrestation, du jugement, des tortures et de la crucifixion de Jésus. Il avait vu l’attitude de la foule et, par contraste, celle de Jésus.

Il avait entendu les sept paroles que Jésus a prononcées en croix, sa demande au Père de pardonner à ses assassins (Lc 23.34), ou son bref dialogue avec le larron repentant (Lc 23.42-43).

Il avait surtout entendu comme Jésus, au moment de rendre l’âme, avait encore appelé Dieu son « Père ». Tout ce spectacle, cette puissante annonce de la Loi et de l’Evangile, a poussé l’officier à confesser : « Cet homme était vraiment le Fils de Dieu ! »

Nous aussi, nous voulons répéter la confession de foi de ce nouveau converti. Jésus-Christ, à la fois vrai Dieu et vrai homme, a parcouru le chemin de la croix de plein gré, pour notre salut.

Dieu n’avait rien à reprocher au saint qu’il était. Jamais Jésus n’aurait été frappé par la colère de Dieu s’il ne s’était pas présenté à notre place devant le tribunal de Dieu, s’il n’avait pas endossé nos péchés et notre culpabilité.

C’est ainsi qu’« il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent [avec foi] l’auteur d’un salut éternel » (Hé 5.9).

Jamais nous ne pourrons assez lui dire et lui montrer notre gratitude pour son sacrifice, pour tout ce que cela a changé pour nous, pour toutes les bénédictions que cela nous a procurées : Dieu est maintenant apaisé envers les pécheurs que nous sommes, il nous a même adoptés comme ses enfants, il nous accompagne, nous protège et nous bénit dans cette vie et nous a donné le ciel en héritage.

Tout cela, nous le devons au fait que Jésus ait apporté ce sacrifice énorme, volontaire, mais ô combien bénéfique pour nous !

Amen.

Jean Thiébaut Haessig

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